Sur écoute

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J’ai mis des gens sur écoute. Beaucoup de gens. Près de de trois cents en fait; et j’en rajoute tous les jours. Pour certains c’est peu mais, pour moi, vous comprendrez que ça me fait tout un tas de gens à surveiller. D’autant que ces gens parlent beaucoup, discutent sans arrêt avec d’autres individus qui partagent leur vision des choses ou commentent sans gêne l’actualité qui les interpelle. C’est passionnant, j’avoue. Un peu inquiétant aussi car il faut dire que la plupart des gens que j’ai mis sur écoute sont des fous de Dieu. Des gens pour qui Dieu et l’amour d’une vision passéiste de la patrie vont de pair. Pour la plupart, ce sont des Blancs, hommes ou femmes, qui ont une sacrée peur de la différence. Des gens qui ont l’impression qu’ils sont les habitants privilégiés d’une nation bénie par Dieu et qui considèrent que le fait d’avoir une arme à feu est un droit inaliénable, d’autant qu’ils paraissent souffrir d’insécurité maladive et sentent le besoin de se protéger en tout temps.

Trop souvent, ces gens ont une vision étonnamment simpliste des choses et trafiquent sans vergogne la vérité au profit de leurs idées surannées. Ces gens sont des militants et leur cause n’a rien à voir avec le respect d’autrui et le bien-être de l’humanité au sens global. D’où mon inquiétude. Je n’ai pas envie de commenter à chaud ni de retweeter les énormités qu’ils balancent, de peur de faire découvrir comme celui je suis vraiment: je ne suis pas l’un des leurs mais je prétends l’être. J’observe sans mot dire, j’écoute en silence.

Question de me rassurer sur la nature humaine, j’ai aussi mis sur écoute des groupes de presse, des ONG et des gens qui paraissent faire la part des choses. Pour le moment, je me contente de retweeter ce qui se dit du côté censé des choses, question de montrer à ces fous de Dieu qu’ils sont complètement à côté de leurs pompes. Mais bon, c’est sans doute un peu naïf de ma part.

À force d’écouter ce qui se dit chez les fous de Dieu, ces amoureux d’un rêve utopique et d’un passé perdu, on se rend compte que le phénomène est planétaire, qu’il se retrouve aux États-Unis, en Europe, ici au Canada ou ailleurs au Moyen-Orient. Les moyens sont certes différents mais les intentions et les intervenants sont similaires sans que personne ne l’admette vraiment. Signe d’une époque où les communications n’ont plus de frontières, où l’on redéfinit sans cesse les niveaux de langage et jettent aux ordures les icônes les plus respectées, désormais les gens de la majorité autrefois silencieuse sortent en vociférant du placard et lancent  sur la place publique des idées destructrices et xénophobes qui font froid dans le dos.

Et c’est un peu de là qu’est venue l’idée de ce blogue: pouvoir publier des documents d’opinion issus de mes observations sur ces gens que j’ai mis sur écoute, sans pour autant s’immiscer dans le dialogue de sourds que l’on retrouve sur les médias sociaux. Tenter à ma façon de contribuer au débat en abaissant les silos de discussion qui s’élèvent à droite comme à gauche avant qu’il ne soit trop tard et que ce déferlement constant de propos incendiaires ne mette le feu aux poudres de façon définitive. L’exercice m’apparaît certes risqué et seul le temps me dira si le jeu en vaut vraiment la chandelle.

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